Le deuxième tome de la vie de Julie Patit-Clou, La Fille de l’Exposition universelle, emmène le lecteur à Paris sur le champ de Mars, en 1867. Jack Manini et Etienne Willem y dressent un tableau pétillant de la deuxième Exposition universelle parisienne.
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Julie Petit-Clou a bien de la chance. Pas spécialement parce qu’elle possède de réels talents de voyance, mais plutôt parce qu’elle est née en 1843. Sa date de naissance va en effet lui permettre d’assister à toutes les Expositions universelles de Paris, depuis celle de 1855 – l’objet du précédent album de la série – jusqu’à celle de 1937. En vogue dès le début du XIXe siècle, les Expositions nationales fleurissent à travers toute l’Europe, à tel point que le Royaume-Uni de la reine Victoria organise à Londres en 1851 la première Exposition universelle (The Great Exhibition of the Works of Industry of all Nations), exacerbation de la puissance britannique, du machinisme et du libre échange, sous la fonte et le verre du Crystal Palace. Une nation comme la France, dont le dirigeant est un anglophile convaincu, ne peut rester sans réaction face à cette débauche de progrès techniques. Napoléon III décide donc en 1853 qu’il se tiendra deux ans plus tard, sur les Champs-Élysées, une Exposition universelle de l’industrie et des Beaux-arts. Du 16 mai au 9 novembre 1855, 4 280 040 visiteurs payants se rendent au Palais de l’Industrie, le long de la « plus belle avenue du monde », ou au Palais des Beaux-arts, avenue Montaigne, pour découvrir les productions de 34 pays. Il faudra toutefois attendre douze ans avant que Paris n’accueille une nouvelle Exposition universelle. Cette fois, les sites choisis sont le Champ de Mars (sur lequel est construit un gigantesque bâtiment ovale de 490 mètres sur 380) et l’île de Billancourt. Plus de dix millions de visiteurs passent les portes du parc de l’Exposition entre le 1eravril et le 3 novembre 1867.
Choisir de prendre comme toile de fond les Expositions universelles est une riche idée scénaristique. Ces événements concentrent en effet les meilleures innovations technologiques de l’époque. Celle de 1867 ne déroge pas à la règle, Jack Manini se régale en jouant avec le palais Omnibus (le bâtiment principal ovale), l’aquarium géant animé par un scaphandrier (dont Jules Verne s’inspirera pour son 20 000 Lieues sous les mers), le ballon captif d’Henri Giffard (qui monte à 5 000 mètres d’altitude), l’élévateur hydraulique de Léon Edoux (qu’il baptise « ascenseur ») ou les bateaux-mouches (ces embarcations mises au point dans le quartier de la Mouche à Lyon, en circulation pour relier le Champ de Mars à Billancourt). Sa roulotte de diseuse de bonne aventure (de mère en fille) étant installée aux pieds du Champ de Mars, Julie Petit-Clou profite de l’effervescence créée par l’Exposition universelle. Elle rencontre même certaines personnalités présentes pour l’occasion. Napoléon III, bien sûr, à l’origine de l’événement, le baron Haussmann (grand ordonnateur des travaux urbains de Paris, présenté sous un jour surprenant), ainsi que le tsar Alexandre II, une des nombreuses têtes couronnées invitées. D’ailleurs, le 6 juin, ce dernier est la cible d’un attentat alors qu’il se promène en calèche à Longchamp avec l’Empereur des Français. Le tireur, le Polonais Antoni Berezowski, déclare à son procès qu’il a voulu ainsi libérer son pays, encore sous le joug de la Russie. Julie Petit-Clou est également en contact avec le milieu anarchiste, autre menace mortelle pour les grands de ce monde-là. De l’Exposition universelle de Paris de 1867, il ne reste rien aujourd’hui (sauf peut-être les bateaux-mouches). Le deuxième tome de La Fille de l’Exposition universellecélèbre avec fantaisie un événement éclipsé par ses successeurs de 1889 et 1900.
Thierry Lemaire
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